Chindia

Coopération ?

La visite de Narayanan ramena un peu de réalisme et de modération dans les relations sino-indiennes. Il rappela la pensée de Gandhi qui disait

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L’état des relations aujourd’hui

En octobre 2013, le Premier ministre indien, Manmohan Singh, et son homologue chinois, Li Keqiang, signèrent à Pékin un accord de coopération concernant leurs

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Une Chindia, vraiment ?

De leurs premières discussions bilatérales au début des années 1950 à celles qui ont permis au dialogue de reprendre après les vicissitudes de l’après-guerre,

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Un rapprochement sous tensions

Une nouvelle fois, un événement extérieur allait s’immiscer dans les relations sino-indiennes, ce fut l’invasion de l’Afghanistan par les Soviétiques en décembre 1979 tandis que le retour au pouvoir d’Indira Gandhi en juillet 1980 s’accompagnait d’une reconnaissance diplomatique du gouvernement cambodgien installé par le Vietnam. La même année, un entretien de Deng Xiaoping à un journal indien et connu sous le nom de « package deal » fut marquant. Il assimila 1962 à un petit épisode qui n’aurait jamais dû arriver et proposa à l’Inde d’avancer vers l’avenir, ce que le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Narasimha Rao, refusa. Néanmoins, en 1981, avec la visite du ministre chinois des Affaires étrangères, Huang Hua, il fut convenu de rencontres annuelles au niveau des vice-ministres ainsi que le début de négociations sur les frontières qui eurent lieu du 10 au 14 décembre.

Un rapprochement commercial

Malgré l’absence de progrès sur ce point, un accord commercial fut signé en 1984 et entre 1981 et 1986, sept rencontres eurent lieu, les deux parties ne signant pas moins de 52 accords de participations à des programmes communs, scientifiques et technologiques. Avec l’arrivée de Gorbatchev, les Soviétiques poussèrent l’Inde à chercher l’apaisement, mais après l’épisode de Sumdurong Chu en 1986-1987 et la création de l’État de l’Arunachal Pradesh, les relations se tendirent une nouvelle fois. Lors de la huitième rencontre en novembre 1987, l’Inde et la Chine décidèrent de relever les discussions du niveau bureaucratique au niveau politique.

C’est la visite du Premier ministre indien Rajiv Gandhi en décembre 1988 qui permit aux relations de progresser. Les deux parties décidèrent de laisser le contentieux frontalier de côté pour avancer sur d’autres points et renouer une « vieille amitié ». Ils créèrent un groupe de travail commun, Joint Working Group, pour trouver sur une solution équitable qui permettrait de maintenir le calme sur les frontières, le dégel des relations sino-soviétiques aidant au rapprochement. La visite du Premier ministre Li Peng en 1991 signifia deux choses, que la normalisation était bien engagée et que, malgré les problèmes, les deux pays étaient unis dans leur désir de créer une ambiance pacifique nécessaire à leur développement. L’année suivante, ce fut le président indien Venkataraman, qui se rendit à Pékin, suivi par le ministre indien de la Défense. La visite de Narasimha Rao, alors Premier ministre, en 1993 à Pékin fut marquée par un accord de « paix et de tranquillité » sur la Line of Actual Control (LAC), la frontière héritée du conflit de 1962[1]Saint-Mézard Isabelle, « Jiang Zemin et Hu Jintao en Inde : une décennie de relations sino-indiennes (1996-2006) », Critique internationale, 2007..

C’est dans cette atmosphère que fut préparée la première visite d’un président chinois en Inde, celle de Jiang Zemin du 28 novembre au 1er décembre 1996. Cette visite était l’annonce d’un changement de politique de la part de la RPC vis-à-vis du sous-continent, en particulier sur la question de l’axe sino-pakistanais. Jiang Zemin appela les Pakistanais à mettre de côté le problème du Cachemire et à améliorer leurs relations avec l’Inde. Avec les nombreux gouvernements qu’a connus l’Inde de mai 1996 à mars 1997, le contexte intérieur était plutôt défavorable pour cette visite, mais, malgré tout, le Premier ministre indien et le président chinois s’accordèrent pour établir une relation constructive et coopérative pour le XXIe siècle en rappelant le Panchsheel, mais aussi les responsabilités des deux pays envers la société humaine tout entière et la nécessité pour les pays en voie de développement d’être solidaires sur la scène internationale. Cependant, l’accord sur la LAC présupposait surtout un non-usage de la violence et une timide démilitarisation plutôt qu’un processus engagé de règlement de la question aussi ce n’était pas une grande avancée.

L’impact des essais nucléaires indiens sur la relation sino-indienne

Après de nouvelles élections en 1998 et l’arrivée au pouvoir du BJP, ce seront les essais nucléaires indiens qui perturberont une nouvelle fois les relations sino-indiennes, mais ils ne furent pas responsables à eux seuls de la pause que connurent les relations. Peu avant les explosions, et après le départ du chef d’état-major chinois en visite en Inde, le ministre de la Défense indien, Georges Fernandes, déclarera le 2 mai 1998 que la Chine était l’« ennemi numéro un de l’Inde », et ce à cause de sa participation au développement du missile Ghauri, des incursions chinoises en territoire indien, du traitement des Tibétains et de la construction d’infrastructures à la proximité des frontières. La RPC réagit vigoureusement le 5 mai en déclarant que ces remarques avaient sérieusement saboté l’atmosphère cordiale qui aurait permis d’améliorer les relations entre les deux pays.

Fernandes répliqua que ses propos avaient été déformés et rappela le bon vouloir de l’Inde dans le processus de normalisation. Néanmoins, peu de temps après, une lettre de Vajpayee adressée à Clinton, le 11 ou le 12 mai, fut publiée dans le New York Times[2]Une copie de cette lettre est disponible sur le site du New York Times : http://www.nytimes.com/1998/05/13/world/nuclear-anxiety-indian-s-letter-to-clinton-on-the-nuclear-testing.html. On pouvait y lire que les essais nucléaires étaient motivés par la présence de la Chine à ses frontières et à son aide au programme nucléaire pakistanais. Pour la RPC, ces déclarations n’étaient qu’une excuse pour que l’Inde puisse mener ses essais nucléaires alors qu’elle n’avait pas signé le Traité de non-prolifération (TNP). Cette lettre ne faisait que propulser au grand jour les suspicions et le manque de confiance qu’il existait entre les deux nations. Depuis les années 1970, les stratèges indiens appelaient à une poursuite du programme nucléaire pour rééquilibrer l’asymétrie entre les deux pays aussi cela ne devait pas être une surprise pour la Chine.

La RPC suspendit les rencontres bilatérales malgré les tentatives indiennes d’apaisement comme celle du conseiller à sécurité nationale, Brajesh Mishra, qui rappela en octobre que la Chine n’était pas une menace et que les problèmes pouvaient être résolus par le dialogue. La RPC resta sourde aux explications indiennes et ce ne fut qu’un an après les essais que le dialogue fut restauré. La dixième rencontre avait eu lieu à New Delhi en août 1997, la onzième se tint à Pékin en avril 1999, mais ne provoqua aucune avancée significative. Les essais nucléaires et les déclarations indiennes marquaient encore l’esprit des Chinois et empêchaient l’instauration d’un climat de confiance entre les deux parties, tout du moins entre le BJP et le PCC, car dans le même temps, la gauche indienne était invitée à Pékin pour discuter de la position chinoise. De plus, pour la première fois depuis que le dialogue JWG avait commencé, l’agence de presse chinoise Xinhua avait affirmé en mai 1998 que l’Inde occupait des territoires chinois. Aussi, aux contentieux territoriaux et au problème des liens sino-pakistanais s’ajoutait maintenant le problème nucléaire.

Paradoxalement, les relations commerciales continuèrent et la presse chinoise couvrit des rencontres non officielles comme celle d’un ancien ambassadeur chinois en Inde, Cheng Ruisheng, qui rencontra le président indien en janvier 1999 dans le cadre d’un dialogue entre universitaires indiens et chinois, il faisait partie du groupe assez restreint des « amis de l’Inde » en Chine. Les hostilités indo-pakistanaises du printemps 1999 au Kargil créèrent une situation délicate pour la Chine, mais participèrent peut-être à la fin des tensions liées aux essais nucléaires. La vision de Rajiv Gandhi comme quoi il fallait laisser les problèmes de frontières de côté était mise à mal, mais en 1999 l’Inde était devenue le partenaire commercial principal de la Chine en Asie du Sud. Le président indien Narayanan visita la RPC en juin 2000 et en tant qu’ancien ambassadeur indien en Chine durant la période 1976-1978, il était considéré comme un ami de la Chine. Il avait pour intention de célébrer les 50 ans de la reconnaissance de la RPC par l’Inde, mais aussi de relancer les relations bilatérales. Bien que sans réel pouvoir, cette visite marqua l’esprit des Chinois de manière très positive.

Références

Références
1Saint-Mézard Isabelle, « Jiang Zemin et Hu Jintao en Inde : une décennie de relations sino-indiennes (1996-2006) », Critique internationale, 2007.
2Une copie de cette lettre est disponible sur le site du New York Times : http://www.nytimes.com/1998/05/13/world/nuclear-anxiety-indian-s-letter-to-clinton-on-the-nuclear-testing.html